L'Almoraima, une forêt d'Andalousie, remplie de chênes-lièges, fait partie des biens publics que l'Espagne met en vente. (Yves Tennevin / Wikimedia)

Face à la crise, l'Espagne brade ses bijoux de famille

L'Etat espagnol a annoncé la mise en vente d'environ un quart de son patrimoine public. Parmi les biens à saisir, des bâtiments, des terrains ou une forêt méditerranéenne primaire, véritable réservoir écologique unique en Europe.

Le volume considérable du déficit public de l'Espagne, qui a dépassé les 70 milliards d'euros l'année dernière, a poussé le gouvernement à prendre des décisions radicales. Ce sont donc plus de 15 000 biens publics qui sont désormais ouverts au plus offrant.

Le domaine de l'Almoraima, en Andalousie est l'un des « articles » les plus spectaculaires de cette grande braderie. Comme l'indique le journal Le Monde, dans son édition datée d'aujourd'hui, l'Almoraima fait partie du parc de Los Alcornocales, une étendue de 170 000 hectares de forêt méditerranéenne primaire.

Sur le territoire du parc, situé entre Cadix et Malaga, au sud du pays, vivent plus de deux cents espèces de vertébrés, tels que des chevreuils, des chats sauvages, des loutres ou des aigles. Le réservoir végétal est également immense, composé notamment de chênes-lièges, d'oliviers sauvages, de frênes, de caroubiers, de cistes ou de bruyères.

 

Un hôtel et un aérodrome dans la forêt

L'Almoraima couvre quant à lui plus de 14 000 hectares, dont 90% font partie de Los Alcornocales. Le prix de vente de cette parcelle est estimé à 180 millions d'euros. Afin d'encourager une vente rapide de cette forêt, le gouvernement a décidé d'un plan d'aménagement du site.

Ce plan autorise notamment la création de deux parcours de golf, un hôtel cinq étoiles et un aérodrome. Le but de ces nouvelles constructions étant d'attirer les touristes très fortunés, habitués à fréquenter la station balnéaire voisine de Marbella.

Pour les écologistes espagnols, ou les autorités locales, résolument opposés à cette vente, le risque de voir s'envoler ce joyau de nature est bien réel, même si la transaction pourrait prendre beaucoup de temps.

Le parc de Los Alcornacales jouit d'une protection, mais le fait qu'environ 1300 hectares de l'Almoraima soit situés hors du périmètre du parc fait craindre le pire aux défenseurs de la nature. Le maire de Castellar de la Frontera, le village dont dépend la forêt, redoute ainsi de ne pouvoir repousser les « agressions éventuelles contre cet endroit unique. »

 

Le liège ou les dollars

La municipalité du village, dirigée par la Gauche Unie, de tendance communiste, a établi une alliance avec les écologistes et les syndicats de travailleurs du domaine. Ils réclament ensemble qu'un autre modèle économique soit envisagé pour la forêt.

Ils mettent en avant notamment l'intérêt que peut représenter l'un des plus grands réservoirs de chênes-lièges de toute la Méditerranée. Le développement de l'industrie du liège, accompagné d'une agriculture biologique et de l'accroissement du tourisme rural, sont selon eux les clefs pour maintenir le domaine.

Mais face aux enjeux de la crise et aux liasses de dollars venues du golfe persique ou de la Russie, leur projet alternatif a-t-il seulement une chance d'être étudié ?