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À Pékin, Macron teste la capacité de l’Europe à parler d’égal à égal

Du 3 au 5 décembre 2025, le président français Emmanuel Macron entame une visite d'État en Chine. Cette démarche à haute teneur symbolique cherche à concilier deux impératifs contradictoires : préserver les indispensables liens économiques avec Pékin, tout en réduisant les vulnérabilités stratégiques d'une Europe trop dépendante.

Emmanuel Macron s’envolera mercredi 3 décembre pour Pékin, où il entamera une visite d’État très attendue, de trois jours. Derrière l’agenda officiel — dialogue politique, coopération économique, transition écologique — se cache un enjeu bien plus vaste : redéfinir la relation entre une Europe en quête de souveraineté et une Chine dont l’ascension spectaculaire redistribue les cartes du pouvoir mondial.

Depuis plus d’une décennie, Pékin s’impose comme un acteur incontournable dans les secteurs stratégiques : batteries, panneaux solaires, véhicules électriques, infrastructures numériques, transformation des terres rares. Cette domination, issue d’un savant mélange de planification étatique, d’investissements massifs et d’un contrôle politique serré, place les économies occidentales dans une position délicate. À Bruxelles comme à Paris, un constat s’est imposé : l’Europe dépend trop de la Chine pour assurer sa transition énergétique et technologique.

Macron arrive donc avec une volonté affichée : conserver les liens économiques, indispensables au fonctionnement des industries européennes, mais limiter les vulnérabilités qui pèsent sur la souveraineté du continent. Une ligne de crête difficile, tant Pékin avance avec une détermination qui déroute les observateurs.

Sous l’autorité de Xi Jinping, la Chine a développé un système unique, à mi-chemin entre capitalisme agressif et autoritarisme rigoureux. L’État pilote les orientations économiques, contrôle les données, verrouille les secteurs clés et soutient puissamment les entreprises nationales pour conquérir les marchés étrangers. À l’inverse, les démocraties européennes doivent composer avec des débats internes, des normes strictes et des calendriers politiques fragmentés. Résultat : la Chine avance vite, très vite, pendant que l’Europe peine à se coordonner.

Un partenaire indispensable, mais un rival redoutable

C’est dans ce contexte tendu que s’inscrit la visite du président français. L’Union européenne a ouvert des enquêtes contre certaines pratiques commerciales chinoises jugées déloyales, notamment dans l’automobile électrique. Les fabricants européens dénoncent une concurrence écrasante, nourrie par des coûts imbattables et des subventions massives.

En parallèle, l’Europe ne peut se passer de la Chine pour de nombreux produits essentiels : composants électroniques, batteries, matériaux critiques. À chaque crise d’approvisionnement, la vulnérabilité du continent réapparaît au grand jour. C’est précisément cette dépendance que Macron espère réduire, sans provoquer une rupture brutale que l’économie européenne ne pourrait absorber.

Mais la Chine ne se contente pas d’être un géant industriel. Elle investit dans les infrastructures mondiales, développe sa présence en Afrique, en Asie centrale, en Méditerranée, et cherche à remodeler l’ordre international à son avantage. Sa stratégie globale, cohérente et assumée, contraste avec la relative fragmentation occidentale.

Pour Paris, la question devient : comment maintenir une coopération constructive avec une puissance qui n’est plus simplement un partenaire, mais aussi un compétiteur systémique ? Et comment défendre l’idée d’une Europe autonome dans un monde où les rapports de force s’intensifient ?

Alors qu’il s’apprête à atterrir à Pékin, Emmanuel Macron porte donc la voix d’une Europe prise dans un paradoxe : elle souhaite préserver l’ouverture économique tout en regagnant le contrôle de son avenir industriel. La visite du 3 au 5 décembre sera scrutée dans toutes les capitales européennes, tant elle engage bien plus qu’un simple échange bilatéral.

Face à une Chine qui avance à marche forcée, sûre de son modèle et de son ambition, l’Europe tente de rattraper son retard et de stabiliser une relation devenue centrale pour son avenir. Reste à savoir si ce voyage permettra d’esquisser un nouveau rapport d’équilibre, ou s’il confirmera, une fois encore, la difficulté de dialoguer d’égal à égal avec le géant asiatique.

 

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