Deuxième anniversaire du Hirak sous le signe de l’acharnement judiciaire sur les détenus d’opinion

La justice algérienne se déchaîne sur les militants du Hirak détenus pour avoir simplement exprimé leurs opinions. Les condamnations tombent à quelques jours du deuxième anniversaire du Hirak et au moment où le président Tebboune reprend ses activités après une longue convalescence suite à une infection au Covid.

Le jeune militant Chems Eddine Laalami, 29 ans, dit Brahim, s'est vu infliger deux ans de prison, assortis d'une amende de 200.000 dinars (1.250 euros), par le tribunal de Bordj Bou Arreridj. En détention provisoire depuis le 9 septembre 2020, il devait répondre de six chefs d'accusations. Il a été acquitté pour trois d'entre eux mais condamné pour "offense au président de la République", "outrage à corps constitué" et "publication de fausses informations". Le parquet avait requis quatre ans de prison ferme et une amende de 500.000 dinars.

Une enseignante de l'université d'Annaba, Mouna Bouloudenine, militante du Hirak également, a été condamnée lundi à un an de prison, dont six mois ferme. Le parquet avait requis 2 ans de prison ferme. Elle est accusée de "publications pouvant porter atteinte à l'intérêt national".

Deux autres hirakistes, Ali Naib et Nasreddine Younès, ont reçu des peines de 6 mois de prison, dont 3 mois ferme, devant le tribunal de Tiaret. Placés sous contrôle judiciaire, ils étaient poursuivis, entre autres chefs d'accusation, de "financement étranger pour des actes ayant pour but d'atteinte à la sécurité de l'État", selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD).

Les Algériens assistent stupéfaits à cet acharnement judiciaire, quelques jours après le jugement du jeune étudiant Walid Nekiche torturé et violé durant sa garde-à-vue. Ses révélations ont choqué l’opinion. Le parquet d’Alger a ordonné l’ouverture d’une enquête pour faire la lumière sur les sévices sexuels subis par le jeune homme.

La libération de tous les détenus d’opinion reste la revendication d’une très large partie de l’opinion. Le président Tebboune gagnerait à l’entendre pour s'assurer la confiance de la société civile sur laquelle il compte s’appuyer pour construire sa légitimité.

Elu en décembre 2019, le chef de l’Etat ne s’est pas distingué par des mesures d’apaisement. Il n’a pas levé la pression exercée par la police et la justice sur les libertés individuelles et collectives.

Plus de 70 personnes sont actuellement emprisonnées en lien avec les protestations du Hirak et/ou les libertés individuelles, selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD). Des poursuites fondées dans au moins 90% des cas sur des publications critiques envers les autorités sur les réseaux sociaux.