Très belle soirée au MuCem en compagnie de Cheikh Sidi Bémol et de son orchestre

Rencontre avec Cheikh Sidi Bémol et son groupe avant leur concert au MuCem

A quelques heures à peine de son premier concert à Marseille ce vendredi, nous avons eu une rencontre sur l’esplanade du MuCem avec Cheikh Sidi Bémol (CSB), Da’l Ho pour les intimes, en compagnie de l’incontournable Ira, la manager du groupe. Retour sur son dernier album "El Afia"

Yasmina TOUAIBIA: Quelles sont vos impressions d’ambiance à Marseille ? Pour une première a Marseille ?
Cheikh Sidi Bémol (CSB)Très très beau. Avec  sur notre parcours: la basilique de la Major, la villa Méditerranée et le MuCem. Etonnante de beauté.

Y.T.-  La (mauvaise) réputation de Marseille est peut-être fausse non ?
CSB: C’est surtout que je suis venu rarement à Marseille, pour de brefs passages, et pas dans ce coin-là en fait, que je trouve très beau.

Y.T.--Comment tu penses que le public marseillais va accueillir les sonorités venant de partout ?
CSB:-Oh, je pense que, comme c’est une ville cosmopolite, ils sont habitués à ces sonorités, ce n’est pas nouveau

Y.T.--Alors justement les sonorités dans cet album nous conduisent un petit peu vers l’Inde. Comment avoir réussi le pari de mettre des paroles bien de chez nous sur des sonorités de plus en plus diverses ?
CSB:C’est un genre de challenge que je me fixe à chaque fois. Cette fois, on est parti sur l’idée de mixer les musiques tziganes avec les musiques maghrébines. Pour l’histoire de la musique tzigane, ça va de l’Andalousie jusqu’en Inde, donc on a été jusqu’en Inde (rires) en passant par les pays de l’Europe de l’Est, la Turquie, etc..    

 

Vidéo: Un extrait d'une musique instrumentale qui a enchanté le public au MuCEM au cours de cette très belle soirée



Y.T.-Il y a un titre dans l’album que j’ai moi-même souvent entendu dans les concerts, c’est Viraj (écriture phonétique du mot « virage » prononcé en arabe algérien). Les paroles sont poignantes, évoquant notamment le terrible massacre de Bentalha (dans la nuit du 22 au 23 septembre 1997 à environ 15 kilomètres au Sud d’Alger). Pourquoi le « virage » dans cet album ? Pourquoi maintenant ?
CSB:Ben, y a beaucoup de virages en ce moment, beaucoup, beaucoup de virages. Chez nous, c’est l’incertitude, on ne sait pas très bien où on va. Un peu comme ici d’ailleurs.

Y.T.-Quand vous dites « chez nous », c’est l’ « apatride » qui parle ou le cheikh algérien ?
CSB:Le cheikh algérien, le cheikh algérien (rires). Mais bon, ici, c’est un peu pareil : un période un peu où on ne sait pas où on va. On sait que quelque chose  finit, quelque chose  va naître, mais qu’est-ce que c’est ? Personne « ma3labalouche » (personne ne sait).

Y.T.--Est-ce de l’inquiétude qu’on peut entendre dans tes chansons et ta voix maintenant ? Ou bien des notes d’espoir ?
CSB:C’est de l’espoir, mais tout de même il faut être très prudent. Dans la chanson el Viraj, à la fin, je me demande si on va vers des catastrophes comme celle de Bentalha, ou vers des projets de villes nouvelles, comme Boughezoul ? Quel virage ? Quel tournant ? A force de prendre des virages, est-ce qu’on ne risque pas de retourner pas au point de départ ?

Y.T.--L’Algérie, c’est un rendez-vous annuel, c’est un rituel. Le public algérien vous attend à chaque fois. Les commentaires sur les réseaux sociaux, c’est toujours : « A quand Alger ? A quand Alger ? ». Comment tu perçois l’évolution de cette jeunesse, de cette société ?
CSB: -Je pense qu’il y a une jeunesse vraiment extraordinaire, des gens qui sont très dynamiques, qui veulent créer dans tous les domaines, que ce soit la culture, dans l’économie ; ils créent des groupes, des télés sur internet, et ça fait plaisir… Mais de l’autre côté de l’échiquier, on a un pouvoir qui devient de plus en plus vieux, voire grabataire. Il y a là un vrai problème. Il ne faudrait pas que toute cette formidable énergie chez les jeunes soit gaspillée bêtement, parce que les autres, là-haut, sont dépassés.

Y.T.-Alors justement ça évolue aussi du point de vue du statut des artistes algériens, de manière  très lente peut-être, et très embryonnaire. Quel regard portez-vous sur cette évolution ?
CSB:Il est nécessaire d’avoir un statut et une organisation des artistes. Aujourd’hui la situation est dramatique : certains artistes ont fini leur vie dans des conditions terribles. Donc l’essentiel c’est l’existence d’un statut poussera les artistes à s’organiser vraiment. Il restera encore des détails à régler.

Y.T.-Revenons à votre groupe. Parlez-nous des projets pour les mois à venir, de promotions de votre nouvel album, de tournées en perspective
CSB:Les premières tournées seront pour présenter l’album « Afya »

Y.T.-Pourquoi ce titre « Afia »?
CSB:-
Parce que chez nous «el Afya », c’est la paix, la quiétude, la sérénité. On en a besoin en ce moment, de Afia, la sérénité, pour réfléchir…

Y.T.-Après Marseille, quel sera l’autre port, ou les autres ports ?
CSB:Ca s’organise. On  prépare une tournée qui débutera en avril, à Paris, puis des concerts en Algérie, et cet été on retournera au Canada. Pas mal de dates qui s’annoncent.

Y.T.-On va peut-être dire deux mots de l’autre star du groupe, qui veille au grain et qui fait le lien avec les fans, qui entretient une relation de proximité avec les fans, une proximité qui est exceptionnelle dans votre groupe. Il s’agit d’Ira, notre Ira nationale, méditerranéenne. Comment tu as vécu ce projet ? Comment tu as accompagné ce bébé?
Ira-J’ai fait plus que l’accompagner et j’en suis fière. C’est un projet qui est né d’une rencontre en Algérie, que j’ai défendu contre vents et marées, car on était à deux doigts de l’abandonner en réalité. Il devait se faire avec des partenaires algériens. Cela ne s’est pas fait. On a alors failli l’abandonner car on n’avait pas les moyens de le faire : un album c’est très coûteux. J’ai tenu bon, je me suis accrochée, et finalement cela s’est débloqué, en partie grâce à de nombreux fans.

Y.T.-Que serait le groupe sans Ira ? Comment avez-vous choisi les membres du groupe car finalement ils viennent d’horizons très divers :
CSB: Damien et Maxime, qui ont fait une école de jazz, travaillent avec nous depuis un moment déjà ; et ils avaient des potes avec qui ils jouaient souvent et qui avaient une grande complicité entre eux, et donc nous avons décidé de travailler avec toute l’équipe. Ils sont plus ou moins de la même famille, et c’est bien parce qu’ils se connaissent, ils ont l’habitude de travailler ensemble.

Y.T.--Ira, un petit mot pour la Tribu ? Qui vit au rythme d’Ira finalement
IRA :
La Tribu hélas a été un peu disloquée, dispersée. Ça c’est vraiment dommage, car j’y ai fait des rencontres formidables, de gens avec qui j’ai lié une amitié sincère, et que je pense éternelle. J’ai trouvé mes amis là, et cela me manque aujourd’hui. Alors je cherche à la reconstituer, comme avant, l’embellir avec de nouveaux amis...

 

 

Vidéo: chanson du Bandit

 

3 et 4 avril : concert de lancement du 9ème Album : Afya. Studio l'Ermitage (Paris)

8 mai: Alger TBC
16 mai : Le Hangar (Ivry) -94-
17 mai : 2 pièces-cuisine (Blanc Mesnil) -93-
29 mai : Londres TBC
14 juin : Orly -94-
21 juin : Colombes -92-
27 juin : Malakoff -92-
13 septembre : Festival Toucouleurs. Toulouse -31-
26 septembre : Le Tamanoir. Gennevilliers -92-
 
Les tournées :
*du 15 juillet au 15 août: Canada et  USA
 
Pour toute information : http://www.sidibemol.com/