Le peuple Afghan entre le marteau et l’enclume
Le constat est sans appel : la guerre déclarée en 2001 par les occidentaux pour combattre le terrorisme à la racine, démanteler les bases des talibans et éradiquer Al-Qaïda se solde par un cuisant échec neuf ans après. Pire ! Elle a tout bonnement abouti à un renforcement considérable des talibans, qui semblent à chaque fois renaître de leurs cendres et redoubler de férocité. A quelques heures de l’ouverture des bureaux de vote pour les présidentielles, ils arrivent à frapper jusqu’au cœur de Kaboul et multiplient les menaces envers les électeurs.
Chaque jour qui passe apporte la preuve que l’OTAN fait dramatiquement fausse route. L’option du « tout militaire », de la guerre permanente et totale est une stratégie perdante, qui n’aide aucunement la société Afghane. Et c’est les populations civiles qui paient le plus lourd tribut.
La violence a atteint des sommets en 2007 et 2008, les attentats suicides faisant des centaines de morts dans la population, auxquels il faut ajouter les victimes des nombreuses bavures dans l’intervention des forces occidentales. La plus sanglante a fait plus de 89 tués lors d’un raid aérien dans l’ouest du pays.
La drogue continue à faire des ravages dans la société Afghane, à la faveur de la loi de la jungle qui y règne et fait la part belle aux seigneurs de guerre, puissants chefs de réseaux de trafiquants. La production d’opium a atteint un niveau sans précédent en 2007, correspondant à 93% de la production mondiale selon l’ONU. L’an passé, ce même trafic s’est chiffré à 8,5 milliard de dollars, soit l’équivalent de 8 fois le budget de l’Etat Afghan.
A l’ombre de ce chaos, la corruption bat son plein, au nez et à la barbe des Etats-majors des forces occidentales. Redoutable gangrène, elle sème la méfiance dans la population et creuse le déficit de confiance envers un gouvernement sous perfusion. Autant dire du grain à moudre en abondance pour les talibans, qui ne trouvent par ailleurs aucune difficulté à recruter dans la population, rongée par l’amertume et le désespoir.
Sauf à vouloir prendre le rsique d'un enlisement inutile et dévastateur, les occidentaux doivent se rendre à l'évidence: face à l’enracinement diabolique de l’intégrisme et à la folie meurtrière de la pieuvre taliban, il n’est de véritable parade que le soutien massif au développement accéléré du pays. Plutôt qu’un champ de bataille et de guerre civile, l’Afghanistan gagnerait à se transformer en immense chantier de construction de ponts et de routes, de voies de chemins de fer, d’assainissements, d’écoles, d’hôpitaux, de logements, d’universités… Les Afghans ont en somme besoin d’une alternative à la misère noire dans laquelle ils se débattent et à la dépendance du trafic de l'opium.
Porté à bout de bras par l’Alliance Atlantique, Hamid Karzaï, officiellement au pouvoir depuis 2002, a un bilan lamentable. En s’obstinant dans cette voie, en aidant le pouvoir en place à se maintenir plutôt que de soutenir des courants démocratiques, progressistes et laïques, les occidentaux prolongent le cauchemar du peuple afghan. Ils le condamnent à souffrir entre le marteau et l’enclume.