Julien : "À 15 ans, j’ai fait mon coming-out auprès de ma famille et de mes amis. Alors que ce n’était pas rose, ça n’a fait qu’empirer." (© Miss Buffet Froid)

Résidents du Refuge, ils écrivent contre l'homophobie : le témoignage de Julien !

Médiaterranée, le Refuge et MonRubanBleu® s'associent pour donner la parole chaque dimanche, à un jeune résident du Refuge. Au travers de leurs écrits, ils racontent leur histoire et leurs difficultés face à l'intolérance homophobe pour qu'elle disparaisse de ce monde. Aujourd'hui, nous vous livrons le témoignage de Julien.

Deux mois déjà que Peter est mort. Peter, vous vous souvenez ? Ce jeune homosexuel que ses parents homophobes voulaient exorciser avec le dramatique espoir de changer son orientation sexuelle, chose qu'il avait racontée en ces termes au Refuge :

"Mes parents deviennent de plus en plus hard dans leurs prières latines contre le diable. De toute façon, plus rien ne m'étonne après qu'ils aient fait appel à un prêtre exorciste pour me faire changer de bord."
 

Le jeudi 26 juin, il était retrouvé sans vie à Valmorel, sur un rocher, en bas d'une cascade. Dans la foulée, l'enquête s'était rapidement orientée vers la piste accidentelle, ce à quoi Nicolas Noguier, le président du Refuge avait répondu avec cette grande justesse :

"Personne ne saura jamais pourquoi le jeune garçon se trouvait au bord d'un précipice à deux heures de marche de chez lui, en tenue de ville. Nous ne nous prononcerons jamais sur sa mort mais sur sa vie : une vie qui est celle de centaines d'adolescents en 2014... Une vie qui a été à l'origine d'une mobilisation unique en France. Il aurait été heureux de voir cela. Il faut poursuivre cette belle mobilisation pour que, dans un monde meilleur, aucun adolescent ni parent ne souffre..."
 

L'écriture libère

Animés par cet esprit, LeRefugeMonRubanBleu® et Médiaterranée ont décidé de s'associer pour donner chaque dimanche de ces prochaines semaines, la parole à un résident du Refuge. Pour qu'ils puissent, chacun à leur tour, vous raconter leur histoire et leurs difficultés face à l'intolérance homophobe. Parce que l'écriture libère et transforme les êtres et le monde. Pour Peter aussi... Pour débuter cette série, nous vous livrons ce dimanche 10 août le témoignage de Julien, un jeune de 20 ans actuellement au Refuge :   

"Je suis né le 2 juillet 1994 en Seine-et-Marne, dans une petite ville qui s’appelle Salins. J’y ai habité jusqu'à l’âge de mes dix ans, mais tout n’était pas rose. J’ai vécu pendant 10 ans sous les violences et les menaces de mon père qui était alcoolique ; ma mère était soumise à mon père.

Alors que j’avais dix ans, ma mère a décidé de quitter mon père, le temps de sa garde à vue, et nous sommes partis en pleine nuit. Pendant 1 an, on a vécu heureux et paisiblement.

Quand j’ai eu 11 ans, ma mère a rencontré mon beau-père et là, tout a dérivé. Un beau-père strict et qui manipulait ma mère : elle est redevenue soumise à un homme. Cela ne s’arrangeait pas du tout sous les cris, les pleurs et la colère.

À 13 ans, c’est là que j’ai découvert mon homosexualité. Au départ, je pensais que c’était une maladie et après, petit à petit, j’ai compris que c’était normal et que j’étais attiré par les garçons.

À 15 ans, j’ai fait mon coming-out auprès de ma famille et de mes amis. Alors que ce n’était pas rose, ça n’a fait qu’empirer. Mon beau-père étant homophobe, j’ai encore plus subi sa maltraitance.

Ce qu’ils m’ont fait subir le plus était de m’enfermer pendant deux semaines dans une chambre et de manger dans une pièce à part, parce que mon beau-père disait qu’un homosexuel ne devait pas être à table avec eux.

Au moment de mes 17 ans, il y a eu une décision judiciaire et le juge m’a placé immédiatement pour homophobie et maltraitance. Ce soir-là je suis arrivé dans un foyer d’accueil pour jeunes mineurs. J’y suis resté pendant 1 an.

Pendant cette année et jusqu'à l’âge de mes 19 ans, j’ai connu la prostitution, les agressions, la drogue, l’alcool, les tentatives de suicide, la rue et le CHRS.

Vivre à la rue et dormir dehors, alors que votre mère habite juste à 20 minutes de là où vous dormez, fait monter beaucoup de haine en vous.

Le 6 juin 2013, j’étais accueilli par l’association Le Refuge où là j’ai eu du réconfort, le soutien d’une famille où je me sens bien.

Le Refuge m’a fait grandir, et m’a apporté beaucoup de choses, en moi et sur le plan professionnel."