Amira Bouraoui, porte-parole du mouvement Barakat ! (DR)

Algérie: le mouvement Barakat continue à défier le pouvoir

Les manifestants rassemblés samedi 15 mars à l’appel du Mouvement Barakat n’ont pas été réprimés. La campagne de Bouteflika démarre dans un contexte chaotique, marqué par des affrontements communautaires dans le sud.

Coup de théâtre au cœur d'Alger blanche ! Venus scander pacifiquement des slogans hostiles au "mandat de la honte", dénoncer la "prise en otage" du pays par un clan de ploutocrates alliés à l'aristocratie militaire, pousser des cris de colère et d'indignation au nom d'une "Algérie libre et démocratique"; les manifestants n'ont pas été sauvagement réprimés comme à l'accoutumée... Les policiers en uniforme et en civil présents sur les lieux, n'ont pas fait usage de leurs matraques et les "paniers à salade" sont restés vides. Les manifestants on été seulement tenus à l'écart des badauds. Moment d’émotion : l’apparition de la moudjahida  (combattante) Annie Steiner (1), venue exprimer son soutien avec un bouquet de fleurs. D’autres rassemblements pacifiques anti-Bouteflika ont eu lieu à Constantine (est), Batna (Aurès) et Tizi-Ouzou  (Kabylie), sans déclencher de répression.

Le pouvoir algérien veut toujours empêcher que cette étincelle mette le feu aux poudres à un mois des présidentielles, mais il opte désormais pour une autre méthode, faisant mine de lâcher du lest face aux opposants, tout en mettant les bouchées doubles pour la campagne de Bouteflika. Une redoutable machine s'est mise en branle avec les moyens publics et de la cagnotte mise à disposition par une clique d'hommes d'affaires. L’entrée en scène du candidat fantôme (Bouteflika) n’en connaît pas moins quelques ratés. Le Forum des chefs d’entreprises (FCE) lui a apporté son soutien, mais non sans créer des divisions en son sein. La puissante organisation des anciens Moudjahidines (combattants) laisse planer le doute sur son alignement derrière le président sortant. La tenue du premier meeting de campagne en l’absence de ce dernier a fait un flop. Les participants, ramenés pourtant de différentes régions du pays n’ont pas fait salle comble. Les affrontements dans la région du Mzab (sud) entre mozabites et arabes, qui ont fait trois morts et plusieurs blessés, provoquent un choc dans l’opinion qui s’interroge sur les dessous de ce déchirement communautaire et sur l’impuissance du gouvernement à stopper les violences. Les partisans de Bouteflika serrent désormais les rangs dans une fuite en avant pour parvenir à la date du scrutin pour enfin.

(1) Engagée aux côtés du mouvement indépendantiste, Annie Stener a été arrêtée le 15 octobre 1956 et condamnée en mars 1957 par le tribunal colonial à cinq ans de réclusion puis incarcérée à la prison de Barberousse avant d’être libérée en 1961.