2009, une année à surveiller pour les Etats méditerranéens.
En apparence, la Méditerranée semble constituer un ensemble géographique hétérogène de pays aux spécificités historiques, culturelles et religieuses fortes. Mais il n’en reste pas moins que les pays méditerranéens connaissent de réelles interconnexions entre eux et qu’ils possèdent des enjeux économiques et sociétaux similaires.
Que ce soit face à la crise financière qui n’a épargné aucun Etat, le conflit à Gaza qui a mobilisé à la fois les gouvernements et les opinions publiques et médiatiques, ou encore les débats sur l’immigration et sur la place accordée à la religion, la zone méditerranéenne peut logiquement être considéré comme un objet d’étude à part entière et une ère d’étude cohérente et crédible. Mediaterranée vous propose un tour d’horizon des enjeux à venir pays par pays.
Principale victime de la crise financière, l’Europe a déjà dépensé des milliards d’euros aux contribuables sans pour autant enrayer ce qui semble être une dynamique de récession. Dans un climat social tendu ou les questions d’emploi, de pouvoir d’achat mais aussi d’immigration occupent une place majeure, chacun des pays européens tentent de relancer leurs économies.
Avec une dette estimée à 66% du PIB selon les critères de Maastricht, la classe politique française s’affronte actuellement sur le contenu du plan de relance économique à l’heure où de grandes mobilisations traversent le pays qui doit aussi faire face aux dégâts engendrés par la tempête Klaus, estimés à plusieurs centaines de millions d’euros de réparation pour la France et son voisin espagnol.
En Espagne, outre la gestion de la crise, l’un des principaux débats de l’année 2009 sera sûrement la politique d’immigration qui selon certains à conduit à une « droitisation » du parti socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero. Dernièrement, l’institut national des statistique espagnoles estimait à 945.000 le nombre de sans papier en Espagne, le gouvernement lui les estime à 300.000.
Le pays, qui reste le premier bénéficiaire des aide de l’UE en matière de lutte contre l’immigration a durci sa politique et ses contrôles (416 000 expulsés sont recensés depuis l’arrivée du parti socialiste en 2004) et à veiller à ce que les accords passés avec les pays des migrants soient mieux respectés. Résultats, l’Espagne a vu son immigration baissé, avec 46 000 sans papiers expulsés provenant de 29 pays en 2008 (contre 56 000 l’an dernier).
En Grèce, les prévisions 2009 annonce une baisse de la dette interne estimée à 91,4 % du PIB, et le taux de croissance attendu sera supérieur à la moyenne européenne. Pour autant, malgré un remaniement ministériel (à l’ordre publique et à l’éducation) engendré par les émeutes de la fin d’année, les dirigeants, largement décrédibilisés par leurs bilans et les scandales nationaux, n’ont pas réussi à apaiser les tensions sociales qui ont comme porte drapeaux la génération dite des «600 euros» (les jeunes diplômés du pays en situation précaires). Sur le plan migratoire, la Grèce ne peut plus assurer la protection de ses réfugiés et fait l’objet de critiques régulière de Bruxelles et des défenseurs des droits de l’homme pour son traitement d’asile.
Comme pour les deux pays précédents, l’Italie risque de connaitre de nouvelles difficultés. Symboliquement, le PDG de la firme Fiat vient d’annoncer que 60.000 emplois pourraient être supprimés dans le secteur de l’automobile. Autre symbole, l’île de Lampedusa qui voit arriver des milliers de clandestins chaque années refuse à travers ses habitants la construction d’un deuxième centre de rétention pour les sans papiers. L’Italie a vu débarquer sur ses côtes 36.900 clandestins, soit une hausse de 75% par rapport à 2007 selon le ministère de l’intérieur italien.
Dans ce contexte tendu et peu optimiste, les élections européennes de Juin 2009 s’avèreront être un enjeu majeur pour l’Union Européenne. Plus encore que de compter sur le plan national pour les partis (notamment pour le parti socialiste), elles permettront d’avoir une première tendance électorale de l’opinion européenne face à la crise et aux divers plans de relance beaucoup discutés au sein des pays membres.
Par ailleurs, bien que certains Etats européens apparaissent moins médiatisés en ces temps de crise, il n’en demeure pas moins que pour eux l’année 2009 sera importante. C’est le cas notamment de l’Albanie et la Croatie qui joue cette année leur rentrée à l’OTAN.
Enfin, au Maghreb et au Proche Orient, la guerre à Gaza risquent de donner un peu plus de crédit aux discours radicaux. Les difficultés économiques (inflation et pénuries), et les futures échéances électorales compliquent un peu plus la marge de manœuvre pour les régimes en place.
Avec une abstention de 63%, et un vote blanc et nul à plus de 18%, au législative de 2007, les marocains ne se retrouvent plus dans leurs institutions et les municipales de 2009 risquent de confirmer ce fait. Et alors que les risques contestataires (manifestations et émeutes) et une hausse de la criminalité sont à craindre, ni la future hypothétique réforme constitutionnelle, ni les timides réformes économiques ne risquent de changer la situation pour cette année.
En Algérie, l’échéance des élections présidentielles laisse présager malheureusement un regain de violence. M. Bouteflika, dont personne ne doute de sa future réélection déjà contestée, veillera à maintenir un investissement massif des pétrodollars dans divers secteurs (BTP, industries..). L’absence d’investisseurs étrangers suite à la crise financière, obligera peut être l’Etat à se rallier aux entreprises privés algériennes.
Au Proche Orient, beaucoup d’attente sont portées sur la nouvelle administration américaine. Outre les élections législatives au Liban prévues en Juin qui risquent de donner lieu une énième fois à des tensions, on note que libanais et syriens viennent de normaliser leur relation diplomatique pour la première fois depuis les années quarante.
En Egypte, la crise à Gaza et les pénuries de pain pourrait renforcer encore plus la position des islamistes en tant que seule force d’opposition. La fin de règne de Housseni Moubarak, les incertitudes concernant la capacité de son fils Gamal à apaiser les tensions, font de cette future passation un enjeu sensible pour les rivalités internes de pouvoir. Par sa position géographique et historique, l’Egypte est lié au conflit de Gaza. Soupçonné par le Hamas de collaboration avec Israël, pointé du doigt par les populations arabes pour ne pas avoir permis l’acheminement d’aide aux palestiniens via ses frontières, le régime égyptien est devenu au côté des israéliens le bouc émissaire préféré des manifestants pro-palestiniens.
Pour la Turquie, son actualité extérieure pourrait renforcer le parti islamique de l’AKP pour les municipales de 2009. Le conflit Kurde, la guerre à Gaza et le blocage des discussions avec l’UE risque d’alimenter les discours populistes focalisant le débat sur l’identité et la question de la religion au sein de la société, éclipsant les questions et les problèmes économiques : selon les prévisions du groupe Euler Hermes, la Turquie devrait connaitre une inflation de 10%, et une croissance de 1%.
Pour l’année 2009, le conflit Israélo-palestinien gardera logiquement une part d’imprévisible. Les échéances électorales (notamment les élections législatives israéliennes prévues le 10 février) et les luttes internes au sein des deux camps compliquent encore plus la situation. Toutefois, l’arrivée d’une nouvelle administration à la maison blanche, la reconnaissance de l’Etat d’Israël et des frontières de 1967 par Khaled Mechaal, un des principaux dirigeants du Hamas, et les pressions faites sur l’Etat hébreux après la mort de centaines de civils à Gaza, pourrait, espérons le, permettre la signature d’un accord de paix.