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Algérie : le pouvoir de l’ombre donne son feu vert pour un 3ème mandat de Bouteflika

Un, deux et trois mandats ! Abdelaziz Bouteflika, président algérien en exercice, a désormais la voie libre pour prolonger son long séjour à la tête de l’Etat. La petite retouche qu’il vient d’apporter à l’article 74 de la Constitution supprime la limitation des mandats. La durée reste fixée à cinq années, mais le titulaire pourra rempiler autant de fois qu’il le souhaite.

Définitivement ficelé et rendu public, le projet est soumis pour « avis motivé » au Conseil Constitutionnel. Il passera ensuite comme une lettre à la poste au Parlement. En effet, on imagine mal les députés de la «majorité présidentielle » s’y opposer. Le toilettage constitutionnel concerne également d’autres aspects (lire ci-contre), liées à la « protection des symboles de la glorieuse Révolution de Novembre », à la « promotion de l'écriture et de l'enseignement de l'histoire » et aux « droits politiques de la femme ».

Notons que le chef du gouvernement se dénommera à l’avenir « Premier ministre » et qu’il pourra être assisté d’un ou de plusieurs "Vice-Premier ministres" nommés par le chef de l’Etat. Petite surprise enfin, le poste de Vice-président qui avait alimenté tant de spéculations ne figure pas dans le projet. Les mauvaises langues affirment que Bouteflika n’a pu imposer l’islamiste Abdelaziz Belkhadem, ex-chef du gouvernement en embuscade.

Comment le président algérien justifie-t-il la réforme essentielle des mandats à répétition ? Bouteflika dégaine les expressions magiques de « souveraineté » et « d’expression populaire », de « libre choix du peuple », de « transparence » , « d’élections libres et pluralistes » et… « d’alternance ».

On croît rêver. Le président évoque ce qui justement fait gravement défaut dans le fonctionnement du système politique algérien. « L’alternance » est une vue de l’esprit dans un délire démagogique. Les obstacles sont de taille.

L’expression démocratique est réduite à néant. L’opposition est un camp quasiment désert. Les députés de la seule formation d’opposition présente au Parlement (RCD, centre gauche) se démènent comme des diables pour se faire entendre. N’était l’usage intelligent de l’Internet on pourrait oublier leur existence. Les espaces médiatiques publics leurs sont soigneusement fermés. Les feuilles de choux qui subsistent grace aux biscuits de la publicité s'en méfient comme de la peste.

Trop occupés à des parties de règlements de comptes internes les ex-communistes et autres militants pour la démocratie et le progrès social prêtent le flanc à toutes les manipulations sournoises et finissent par se neutraliser. Et quand par miracle ils sortent la tête de l’eau, ils se trompent d’ennemis et s’empressent de tirer à boulets rouges dans le camp démocratique. Le pouvoir algérien peut dormir tranquille.

Ce pouvoir-là peut continuer à entretenir une flopée de clientèles aux ordres en redistribuant la rente pétrolière, à gérer les équilibres entre les clans et le régionalisme, à « arranger » les résultats électoraux, à composer avec les islamistes «modérés», partie prenante de la coalition conservatrice régnante, et à se camoufler surtout dans l’opacité la plus totale.

Qui donc dirige véritablement l’Algérie ? La réponse reste pluôt floue. Les plus rigoureux des observateurs, des analystes de la scène algérienne se résignent à parler de « décideurs ». On imagine une espèce de secte de généraux super majors, inusables, éternels…Diable !

Nul n’en doute en effet, l’armée et les « services » sont bien entendu les maîtres d’orchestre. C'est ce «pouvoir de l’ombre » qui fait royalement abstraction de la société civile et de la classe politique. Il vient de donner son feu vert pour un troisième mandat à Abdélaziz Bouteflika. Sûrement faute de mieux, mais probablement aussi pour pendre le temps de lui trouver un successeur.

L’Algérie est encore à mille lieux du fonctionnement « pluraliste et transparent » dont se prévaut l’hôte actuel, et dans un futur proche, du palais d’El Mouradia. Les Algériens ont encore droit à une grosse supercherie.

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