La plainte déposée par Corsica Ferries auprès du tribunal de l'Union européenne a fait mouche, cinq ans après la validation pourtant formulée par Bruxelles... (N.E)

Corsica Ferries et le Tribunal de l'Union Européenne remettent la SNCM dans la nasse néolibérale

Une fois n'est pas coutume, la SNCM doit à nouveau faire face à une offensive néolibérale ourdie à l’échelon européen ! La Société Nationale Corse Méditerranée vient en effet d'apprendre que le Tribunal de l'Union Européenne a décidé, ce jour, d'annuler l'accord formulé en 2008 par la Commission de Bruxelles en faveur des aides accordées par la France à la SNCM en 2002, puis lors de sa privatisation en 2006.

Alors que le Conseil d’État s'était interposé en juillet dernier contre les vents du néolibéralisme levés par Corsica Ferries jusque devant le TGI de Marseille contre la SNCM, voilà que l'entreprise française doit désormais appréhender les conséquences judiciaires et économiques de ce jugement complètement à contre-courant de l'avis prononcé en 2008 par la commission européenne qui avait alors estimé que les aides publiques de l’État (1) étaient compatibles avec les règles du marché en commun.

Cinq années plus tard, le Tribunal de l'Union Européenne, encore une fois saisi par Corsica Ferries, affirme l'inverse : pour lui, la Commission aurait dû conclure que les aides apportées constituaient des aides d’État susceptibles de fausser le sacro-saint principe de la concurrence libre et non faussée...

Le dossier est renvoyé devant la Commission européenne

Le dossier est donc renvoyé devant la Commission européenne. Et pendant ce temps, l'enquête ouverte en juin par cette même instance, au sujet des fonds publics attribués à la SNCM et la CMN en compensation de « l'obligation de service public » assurée au nom de la continuité territoriale entre le continent et l'Île de Beauté, se poursuit, avec une menace de condamnation financière allant de 30 à 50 millions d'euros.

Face à ce nouveau coup porté par le concurrent italien Corsica Ferries dans son activité principale de desserte du continent français et de la Corse, la SNCM indique qu'elle fera appel de ce jugement dans un communiqué de presse où elle souligne sereinement qu'« à ce stade » de la procédure, « il n’y a pas d’impact financier direct pour la SNCM, le tribunal renvoyant l’examen au fond à la Commission Européenne sans préjuger du résultat de ce réexamen ».

Cette décision du Tribunal de l'Union Européenne résonne cependant comme la mauvaise nouvelle de la rentrée pour l'entreprise au pavillon français qui, en pleine dynamique de changement, multiplie les réussites avec une saison estivale en bonne progression (+15% de passagers et +5% de parts de marché) et un projet de renouvellement de sa flotte qui s'avérerait fort utile, tant pour la pérennité et le développement de cette entreprise, que pour la lutte contre la désindustrialisation de la France, au moment où les chantiers de Saint-Nazaire restent toujours en tête de ligne pour l'obtention de ce potentiel marché dont Médiaterranée Languedoc-Roussillon vous avez révélé l'existence.

N.E

(1). La SNCM avait reçu en 2002 un apport en capital de 76 millions d'euros de la part de la CGMF (Compagnie générale maritime et financière, détenue à 100% par l’État français) qui détenait à cette époque 80% de son capital. En 2006, les mesures du plan de privatisation de la SNCM comprenaient une recapitalisation de la SNCM pour un montant de 158 millions d'euros, un apport supplémentaire en capital par la CGMF de 8,75 millions d'euros et une avance en compte courant pour 38,5 millions d'euros visant à financer un éventuel plan social.

Mise à jour du 12.09.12, à 10h20 : Dans un communiqué de presse diffusé hier, Pierre Moscovici (ministre de l’Économie et des Finances), Arnaud Montebourg (ministre du Redressement Productif) et Frédéric Cuvillier (ministre délégué aux Transports, à la Mer et à la Pêche) déclarent que « le gouvernement prend acte » de la décision du Tribunal de l'Union Européenne « s'agissant des conditions de la privatisation de la SNCM ».
« La question d'un éventuel pourvoi devant la Cour de justice de l'Union Européenne est en cours d'examen, à la lumière de la motivation de la décision du Tribunal de l'Union Européenne », indiquent également les trois ministres, précisant que « l’État examinera avec l'actionnaire majoritaire Veolia les conséquences de cette décision et les suites à lui donner ».

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