Après le meurtre de Salah au Milk, à Montpellier, son collectif de soutien explique les motivations de la marche blanche organisée aujourd'hui.

Marche blanche pour Salah : ''nous demandons vérité et justice, pacifiquement''

Médiaterranée a rencontré Nasser, l'un des porte-paroles du collectif de soutien à Salah, pour parler de la marche blanche qui sera organisée ce jeudi à Montpellier. Tous demandent que « justice soit faite », suite à la mort de ce jeune homme de 22 ans poignardé juste devant le Milk, face à une dizaine de clients de la boîte de nuit.

A la veille de la marche blanche qui sera organisée demain à Montpellier, Médiaterranée Languedoc-Roussillon a rencontré Nasser (1), du collectif de soutien de Salah, ce jeune homme qui, avant de pouvoir fêter ses 22 ans, a été mortellement poignardé à Montpellier le dimanche 5 mai, juste devant l'entrée du Milk, à Montpellier. Quelques instants auparavant, Salah avait été violemment sorti par le service sécurité de la boîte de nuit, comme en a témoigné sa compagne en deuil.

Aujourd'hui, Nasser nous parle des motivations de la marche de solidarité qui sera organisée demain (2), cinq jours après le décès de son ami survenu le 11 mai. Il évoque aussi l'avancée des démarches juridiques en cours, les images de vidéosurveillance et l'appel à témoin lancé, dans le climat d'émoi général créé par ce terrible drame. Entretien...

Quels sont les objectifs de votre marche ?

« En premier lieu, nous voulons demander vérité et justice pacifiquement pour Salah et ce sera le mot d'ordre de la marche. Nous voulons aussi exprimer le soutien massif qui entoure la famille de Salah dans une marche respectueuse de son deuil et de celui de ses proches. Nous avons reçu des milliers de messages de soutien depuis ce drame. Durant la semaine d'hospitalisation de Salah, il y avait chaque jour une centaine de personnes qui venait à Arnaud de Villeneuve pour prendre de ses nouvelles et soutenir sa famille... Et aujourd'hui encore, de nombreuses personnes sont auprès de sa mère pour l'accompagner. Cette marche blanche permettra aussi de montrer aux responsables de la mort de Salah que nous ne sommes pas dans la violence et que nous avons d'autres moyens de répondre à leurs actes en réclamant tout simplement que la vérité et la justice soient faites dans ce meurtre. Nous le faisons pour sa famille, ainsi que pour son honneur et son souvenir. S'il y avait le moindre débordement au cours de la marche, nous serions assimilés à des voyous, et cela, par respect pour la famille de Salah et pour ne pas porter préjudice à l'enquête à cours, nous n'en voulons pas. Il faudra que chaque participant de cette marche ait bien conscience de tout cela. Nous serons d'ailleurs escortés pour que tout se passe bien.

Vous avez lancé un appel à témoin sur votre page de soutien Facebook où vous précisez également que les images de vidéosurveillance du Milk ne sont pas exploitables, vous pouvez nous en dire plus ?

Non, apparemment, les images de vidéosurveillance ne seraient pas très exploitables. Elles seraient floues et on y verrait très mal... Cela me paraît bizarre qu'un établissement privé de Montpellier qui brasse beaucoup d'argent n'ait pas des caméras qui fonctionnement correctement, ce serait se tirer une balle dans le pied, mais les enquêteurs regarderont tout cela de près... Ce qui est certain, c'est que les images ont été saisies par la police, puisque la mère de Salah les a vues au commissariat central de Montpellier. Elle a vu son fils traîné par les vigiles avec une violence dingue. Et elle a vu le reste aussi... Elle a été très choquée.

Vous avez déjà eu des réponses à l'appel à témoins que vous avez lancé ?

Oui, nous en avons déjà reçu une. C'est une personne qui ne risquait pas d'être au Milk le dimanche où Salah a été poignardé, parce que cette dame a été obligée de déménager de la ville de Montpellier, après avoir voulu porter plainte contre un lynchage qu'elle avait subi dans cette boîte de nuit. Elle avait voulu saisir la justice contre le service de sécurité du Milk qu'elle accusait de l'avoir gazée et tabassée à coups de pieds, mais elle s'était heurtée à un mur administratif et avait subi beaucoup de pressions, notamment des coups de fils anonymes qui l'avaient poussée à quitter la ville. Elle est d'ores et déjà en contact avec notre avocat, Me Maxime Martinez.

Son témoignage fait complètement écho à ce que nous subissons actuellement avec Salah : des difficultés très importantes dans le dépôt d'une plainte, une carence dans l'accompagnement des victimes et une insécurité flagrante sur les lieux du Milk... On peut aussi résumer les choses ainsi : face à cette femme, le service de sécurité du Milk avait su gazer et frapper, ce qui est scandaleux ; il y a dix jours, il a été incapable de défendre Salah juste devant sa porte, après l'avoir sorti injustement de la boîte...  Il n'est pas intervenu face aux 10 personnes qui l'ont rejoint, alors qu'elles sont sorties de ses murs pour le lyncher à mort, sur sa propriété privée ! C'est très grave... Nous sommes entrés en contact avec des entreprises de sécurité, la procédure est simple dans un cas d'"embrouille" comme celui-là, malheureusement trop courant en boîtes de nuit : on sépare les parties en conflit et on appelle la police ! Là, ils étaient à 10 contre 1 et ils n'ont rien fait de bon... Ni avant, ni pendant, ni après.

Quelles sont les autres avancées au niveau de votre avocat ?

Notre avocat est confiant, il nous a dit que les choses avançaient très bien, notamment pour ce qui concerne l'enquête policière. Il nous a aussi dit qu'il fallait être patient et nous a assuré que nous aurons bientôt des nouvelles positives dans cette triste affaire. Nous les attendons...

Vous avez eu des contacts avec les autres victimes de ceux que l'on peut maintenant appeler « la bande aux coups de couteau », puisqu'ils ont poignardé trois personnes différentes ce soir-là ?

Je n'en ai vu qu'une des deux. C'est la personne, la seule, qui a très courageusement porté secours à Salah avant de recevoir trois coups de couteau dans le dos. C'est un étudiant marocain qui habitait dans le même immeuble que Salah et qui s'est rendu compte que son voisin était dans la même soirée que lui, au moment où il s'est fait sortir de la boîte de nuit. Ce soir-là, Salah m'avait demandé si je voulais sortir au Milk, mais je n'avais pas pu, comme beaucoup d'autres. Il n'était qu'avec sa compagne et son amie, jusqu'à ce qu'il se passe tout ce que vous savez... »

N.E

(1.) Vu la gravité des faits, le porte-parole que nous avons rencontré pour le collectif a tenu a ce que nous modifions son prénom, pour préserver sa sécurité.

(2).  Le rendez-vous de cette « marche pacifique » de solidarité à Salah est fixé ce jeudi 16 mai à partir de 16h00, au Parc Tastavin, à Montpellier (ligne de tram 2, arrêt Mas Drevon). Le cortège s'ébranlera à 16h30.

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