Le mur prévu entre la Turquie et la Syrie s’étendra sur 2,5 km. (Roger Bunyan / Wikimedia)

Bientôt un mur à la frontière entre la Turquie et la Syrie

Hier, Hayati Yazici, le ministre turc des Douanes et du Commerce, a annoncé que la Turquie avait décidé d’édifier un mur sur une partie de sa frontière commune avec la Syrie. Un mur de plus, dans l’espace méditerranéen.  

La maçonnerie est un métier d’avenir. La destruction, voilà plus de 20 ans du mur de Berlin, n’a pas découragé les entreprises spécialisées en séparation des populations

A petite ou grande échelle, quand le voisin est perçu comme gênant, le plus simple reste de dresser un mur devant lui. Le mur reste LA valeur sûre en terme de protection.

Les exemples, du plus petit au plus grand, ne manquent pas. Cela va du regroupement d’habitants, qui décide de s’isoler du reste d’un quartier, jusqu’aux décisions prises par les états, pour mettre à l’écart une certaine population jugée encombrante. 

Dans le premier cas, sans chercher bien loin, il suffit de se promener dans les quartiers nord de Marseille, pour apercevoir les villas qui se construisent à proximité des cités.

Ceinturées de hauts murs en parpaings, certains nouveaux habitants donnent à leurs maisons des airs de forteresses au beau milieu des barres de béton. 

 

La truelle comme outil politique

Dans un registre plus vaste, la truelle se révèle être un véritable outil politique. Le mur de séparation entre les USA et le Mexique, commencé en 1994, est l’une des plus anciennes réalisations de ce style architectural. 

En Méditerranée, le vieux mur de Nicosie, à Chypre, bâti en 1974, a commencé à s’effriter en 2008. Mais les traces de la séparation entre les deux entités chypriotes (turques et grecques), restent vives.  

Plus récemment, les enclaves espagnoles en territoire marocain, Ceuta et Melilla, se sont dotées de “murs anti-immigration”. La longue “barrière de sécurité” qui sépare Israël et la Cisjordanie, est une autre illustration de cette politique du mur. 

On peut se souvenir également d’Arno Klarsfeld, estimant “de bon sens” sa proposition d’ériger un mur de protection entre “l’Europe prospère” et “le reste du monde qui a les guerres, qui souffre, qui a des privations, etc.“

Au vu de cette tendance, la décision des autorités turques n’a rien de surprenant. Certes, le mur envisagé, sera dressé sur une très courte distance. Long de 2,5 km, il sera bâti sur une zone située près du poste-frontière de Cilvegözü, (province de Hatay, sud), en face du village syrien de Bab al-Hawa.

"Il s'agira de barbelés et d'un mur sur lequel seront installées des caméras de surveillance", a expliqué Hayati Yazici, précisant que "cette construction maximisera la sécurité dans cette zone".

 

La Syrie toujours plus isolée

En février dernier, sur ce poste frontière, un attentat à la voiture piégée, attribué au régime de Bachar-al-Assad par Ankara, avait causé la mort de dix-sept personnes.

La Turquie, qui soutient les rebelles, et appelle au départ du président syrien, est préoccupée par une guerre civile qui gronde à ses portes. Se préserver d’un débordement du conflit syrien sur son sol est indispensable pour les autorités turques. 

Construire un mur est une décision qui se justifie dans cette perspective. Mais ce n’est sûrement pas une piste qui aidera à la résolution du conflit. Au contraire, isoler un peu plus le peuple syrien ne peut que le pousser à continuer d’aller droit dans le mur...