Algérie : un virage énergétique à 60 milliards de dollars entre pragmatisme et vision d’avenir
L’Algérie vient d’annoncer un plan d’investissement historique de 60 milliards de dollars pour la période 2025-2029, destiné à transformer son secteur énergétique. L’objectif : consolider sa position de grand fournisseur d’énergie tout en amorçant une transition vers des sources plus propres et plus durables.
Ce programme, présenté à Alger par le ministre de l’Énergie et des Mines, Mohamed Arkab, marque une étape clé dans la stratégie énergétique nationale.
Le plan repose sur une approche pragmatique : 80 % des dépenses seront consacrées à l’exploration et à la production pétrolières et gazières, tandis que 20 % financeront des projets de pétrochimie et d’énergies renouvelables. « Nous sommes engagés dans la transition énergétique sans abandonner le gaz comme ressource naturelle », a expliqué le ministre, soulignant la volonté d’allier durabilité et stabilité économique. Cette double voie, saluée par plusieurs experts, vise à financer la transition énergétique grâce aux revenus des hydrocarbures.
Un équilibre entre hydrocarbures et énergies vertes
Au cœur du plan, l’Algérie mise sur le solaire et l’hydrogène vert. Le pays prévoit de produire 3 200 MW d’électricité renouvelable d’ici 2026 grâce à 22 sites solaires dans le sud. La compagnie nationale Sonatrach s’est engagée à réduire le brûlage du gaz à moins de 1 % d’ici 2030 et à compenser les émissions de carbone via un programme de reboisement de 520 000 hectares. Des projets pilotes d’hydrogène vert, menés avec des partenaires allemands et émiratis, ouvrent la voie à une nouvelle ère industrielle.
Ce plan de transformation énergétique témoigne d’une vision stratégique à long terme. Les autorités veulent faire de l’énergie un levier de développement social et territorial, en améliorant la qualité de vie et en soutenant les régions intérieures. Le gouvernement entend associer modernisation technologique et justice sociale, afin que la transition bénéficie à tous les citoyens.
L’Algérie cherche également à attirer des investissements étrangers. Un accord de 5,4 milliards de dollars a été signé avec la société saoudienne Midad Energy pour le développement du bassin d’Illizi, preuve de la vitalité du secteur. Grâce à ses gazoducs Medgaz et TransMed, à ses vastes réserves d’hydrocarbures et à son potentiel solaire considérable, le pays renforce sa position de partenaire énergétique clé pour l’Europe.
Une vision stratégique affirmée
Mais cette stratégie, aussi ambitieuse soit-elle, ne peut suffire à elle seule. L’économie algérienne reste encore fortement dépendante des hydrocarbures, qui représentent plus de 90 % des recettes d’exportation. Les observateurs appellent à une diversification plus large -vers l’industrie, l’agriculture ou les nouvelles technologies -afin d’assurer une croissance durable et de réduire la vulnérabilité du pays aux fluctuations des prix du pétrole et du gaz.
Si les projets annoncés se concrétisent, l’Algérie pourrait devenir un pôle énergétique régional majeur, exportant à la fois des carburants traditionnels et de l’énergie décarbonée. Mais la réussite dépendra de la mise en œuvre concrète, de la transparence et de la capacité à attirer et gérer les partenariats internationaux.
En cas de succès, le pays pourrait combler le fossé entre l’ère des combustibles fossiles et celle des énergies vertes.
Au-delà des chiffres, ce plan de 60 milliards de dollars représente une déclaration d’intention nationale : faire de la transition énergétique non pas un slogan, mais un projet de société. En combinant pragmatisme économique, ambition environnementale et développement social, l’Algérie trace la voie d’un avenir énergétique plus souverain et plus durable.