France : mourir dans la rue, l’indignité nationale (Abonnés)
Neuf cent douze morts en 2024. Neuf cent douze vies fauchées dans l’indifférence glacée des trottoirs et des abris de fortune. C’est le terrible bilan dressé par le collectif Les Morts de la Rue. En treize ans, le nombre de décès de personnes sans abri a plus que doublé. En moyenne, ces femmes et ces hommes n’atteignaient pas 48 ans -trente-deux ans de moins que l’espérance de vie nationale. Dans la sixième puissance économique mondiale, on meurt encore de n’avoir pas de toit.
L’insoutenable banalisation de la misère
La Fondation pour le Logement estime à 350 000 le nombre de personnes sans domicile en France, soit 20 000 de plus qu’en 2023. Ces chiffres ne sont pas des abstractions : ils incarnent une réalité brutale, celle de vies brisées, effacées sous les ponts, dans des tentes ou des parkings. L’Île-de-France concentre à elle seule 37 % des décès, mais les Hauts-de-France ont vu leur nombre doubler, notamment parmi celles et ceux qui tentent de traverser la Manche.
On meurt plus jeune, plus tôt, plus seul. Les hommes représentent 82 % des morts, mais la part des femmes ne cesse d’augmenter. Plus terrible encore, 4 % des décès concernent des enfants de moins de quinze ans, un chiffre qui a doublé en dix ans. Dans un pays qui se targue d’être celui des droits humains, ces enfants morts d’errance sont une honte nationale.