« Journal d’un prisonnier » : le livre bouée de sauvetage de Nicolas Sarkozy
Un mois après sa sortie de prison dans l’affaire libyenne, Nicolas Sarkozy publie Journal d’un prisonnier chez Fayard. Un récit qui n’apprend rien, mais qui remet l’ancien président au centre du jeu médiatique. Et cela semble bien être son objectif.
Un mois à peine après avoir quitté sa cellule, Nicolas Sarkozy revient déjà sur le devant de la scène. Avec Journal d’un prisonnier, un livre écrit en quelques jours, l’ancien chef de l’État entend raconter ses trois semaines de détention. Mais le lecteur qui espère des révélations risque de rester sur sa faim. L’ouvrage ne dit rien de neuf. Il n’apporte aucune information supplémentaire sur l’affaire libyenne. Il offre surtout à Sarkozy une nouvelle visibilité, comme une bouée lancée à un homme politique en perte de vitesse.
L’ancien président ressasse ses critiques contre les magistrats. Il assure même qu’on lui reprocherait « de ne pas être de gauche », une phrase qui laisse perplexe. Il attaque aussi Mediapart, à l’origine des enquêtes sur le financement libyen de sa campagne. Rien de très surprenant. On retrouve ici les thèmes qu’il martèle depuis des années, sans nuance, sans distance.
Sarkozy se plaint par ailleurs de ses conditions de détention. Il évoque la solitude, les fouilles, l’absence d’intimité. Il parle des autres détenus, presque comme s’il découvrait un univers dont les Français savent pourtant déjà l’essentiel : la prison abîme, parfois brutalement, la dignité de ceux qui y vivent. La vraie punition, au-delà de la privation de liberté, est là. Cette description, que des associations répètent depuis longtemps, n’apprend rien non plus.
Une opération politique plus que littéraire
La fin du livre tourne clairement le regard vers son camp politique. Sarkozy appelle à une alliance de « toutes les droites ». Le message n’est pas subtil : il s’agit d’un clin d’œil appuyé au Rassemblement national. Une manière de dire qu’il reste un acteur, qu’il compte encore peser, même s’il ne dit jamais jusqu’où il serait prêt à aller.
Depuis samedi, c’est « le week-end Sarkozy ». Toutes les chaînes d’information en continu mettent le livre en Une. Les plateaux débordent de journalistes, de commentateurs, de politologues, tous invités à donner leur avis. Et tous répètent à peu près la même chose : le livre ne révèle rien, mais sa sortie est un événement en soi. On salue la rapidité d’écriture, on applaudit le « témoignage », on interroge ses intentions. Résultat : Sarkozy occupe l’espace, exactement comme il le souhaitait.
Dans le monde politique, en revanche, le silence domine. À droite, les réactions sont rares. Comme si chacun voulait simplement laisser passer l’orage, éviter d’alimenter une polémique qui pourrait de nouveau embarrasser, à l’approche d’échéances électorales déjà tendues. On se résigne. On attend que le bruit retombe. On espère refermer au plus vite ce chapitre qui dérange.
Reste une certitude : Journal d’un prisonnier, en librairie le 10 décembre, n’aura pas marqué l’histoire de l’édition. Mais il aura offert à Nicolas Sarkozy exactement ce dont il avait besoin : une présence, une lumière, une respiration. Une manière de prouver qu’il est encore là – même si personne ne sait vraiment pour dire quoi.