Placards publicitaires sur les métros de Genève, Suisse. (A. Rezgui)

Tunisie : la stratégie de reconquête touristique

La Tunisie prend actuellement part à la Bourse internationale du Tourisme, ITB Berlin, rendez-vous incontournable des professionnels du tourisme jusqu'au 11 mars. Son objectif : reconquérir les touristes européens qu’elle a perdu suite au printemps arabe.

Secteur stratégique de l’économie tunisienne avec 1,8 milliards d’euros de recettes réalisées en 2010, le tourisme n’a pas été épargné par le contrecoup de la révolution de Jasmin. Décrétée « annus horribilis », 2011 restera une année noire pour le tourisme : près d’un tiers de touristes en moins, 3000 emplois supprimés, la fermeture de 17 hôtels, une baisse de recette de 33%.

Très fragilisé, le secteur tente de relancer l’activité touristique pour l’année en cours. L’enjeu est majeur quand on sait que le tourisme représente 7% du PIB et emploie 15% de la population active en Tunisie.

La promotion de la Tunisie en un tour d’Europe

Principal cœur de cible, les touristes européens ont été les premiers a boudé le pays en 2011. Les Français, qui représentaient plus d’un touriste sur cinq en 2010, ont fait défaut à 42% l’année dernière. Le marché allemand a lui aussi accusé une régression quasi-identique. 270.000 touristes ont choisi la Tunisie en 2011 contre 458.600 en 2010.

Selon Habib Ammar, directeur général de l’Office national du tourisme tunisien (ONTT), interviewé par l’agence TAP, la régression qu’a connue le tourisme en Tunisie est liée principalement à « l’émergence d’une mauvaise réputation », inhérente à l’instabilité politique et sociale et au phénomène d’insécurité qui a régné dans le pays pendant des mois.

Depuis le début de l’année, le nouveau ministre du Tourisme, Elyes Fakhfakh, a pris à bras le corps le problème et s’est lancé dans un véritable marathon à la reconquête des touristes européens. En France, en Angleterre, en Italie ou en Allemagne, son principal souci a été de rassurer sur l’état actuel du pays et de souligner la capacité de la Tunisie à accueillir de nouveau ses touristes. En visite à Lyon, ville où il a fait ses études, Elyes Fakhfakh a martelé le fait que « la Tunisie a retrouvé son calme » et que « les conditions sont réunies pour accueillir de nouveau les touristes ».

Elyes Fakhfakh a également multiplié les contacts, les partenariats, les contrats et les soutiens dans les pays qu’il a visités. Ainsi, l’Italie, par l’intermédiaire du ministre du Tourisme Piero Gnudi s’est engagée à aider la Tunisie dans le domaine de la formation touristique et la valorisation du patrimoine culturel. En Angleterre, Nikki White, vice présidente de la fédération Britannique des agents de voyages (ABTA), a décidé, suite à son entretien avec le ministre, que le congrès annuel de l’ABTA en 2013 aurait lieu en Tunisie.

Les deux responsables, britanniques et italiens, ont par ailleurs été invités par le ministre à participer au forum international sur le tourisme méditerranéen prévu les 16 et 17 avril prochains à Djerba.

Les acteurs du tourisme signe une convention de soutien

Et, dans le cadre de la relance du tourisme sur les marchés émetteurs, les principaux acteurs du tourisme et du transport aérien se sont mis d’accord, lundi 5 mars, à Tunis, sur une convention de partenariat. L’objectif est de soutenir le transport aérien et le renforcement de la destination Tunisie par un partage de risque.

Cette convention couvre la période du 1er mars au 31 mai 2012 et a été signée par la FTH (Fédération tunisienne de l'hôtellerie), l'ONTT (l'Office national du tourisme tunisien) et la FTAV (Fédération tunisienne des agences de voyages) et les compagnies de transport aérien : Tunisair, Tunisair Exress et Nouvelair.

Opération pilote déjà créée l’année passée, l’Etat prend en charge à travers le FODEC (Fonds de développement de la compétitivité), les places manquantes sur les vols charters en vue d’éviter les annulations, pour les vols dont le coefficient de remplissage est supérieur à 50% et inférieur ou égal à 90%.

« Le but de ces conventions est d'abord de préserver les intérêts de chaque partenaire et de résoudre les problèmes liés à cette conjoncture particulière », a précisé M. Mehdi Houas, ministre du Commerce et du Tourisme.

Valoriser « valeur » et « volume »

La volonté de la Tunisie de sauver la saison 2012 s’accompagne également d’une réflexion sous-jacente sur la pérennité du schéma touristique balnéaire qui a fait le succès des plages tunisiennes. " C'est la première fois que nous communiquons sur l'hiver ", confirmait, en janvier au site pros-du-tourisme.com, Amel Hachani, directrice de l'Office du tourisme tunisien (ONTT) à Paris. " Nous voulons désaisonnaliser la fréquentation, qui reste à 70% axée sur l'été".

Ainsi, la stratégie de communication met l’accent sur la diversité des régions touristiques en vue de créer un tourisme alternatif au tourisme héliotropique. Et la Tunisie peut se targuer d’une grande richesse qu’elle soit culturelle, archéologique ou naturelle, avec ses parcs protégés et ses sites classés au Patrimoine mondial de l’Unesco, comme le parc national de l’Ichkeul ou l’amphithéâtre d’El Jem.

Car, au-delà du « sauvetage de la saison », voilà aussi l’un des objectifs que s’est donné Elyes Fakhfakh lors de sa prise de fonction, le 27 décembre dernier : pallier les difficultés pour redresser le secteur touristique et profiter de la crise pour traiter des problèmes de fond.