Marseille en alerte : incendie géant et persistant dans les quartiers Nord de la ville
Par djefPublié le
Mardi 8 juillet, alors que le mercure grimpait au-dessus des normes estivales, un incendie d’une ampleur rare s’est déclaré aux portes nord de Marseille, marquant une journée de grande tension. À 11 h, un véhicule embrasé près de l’autoroute A552, entre Pennes-Mirabeau et Marseille, déclenche la catastrophe. En quelques minutes, le feu, attisé par un mistral violent soufflant jusqu’à 90 km/h, s’étend sur la végétation sèche – fruit d’une canicule prolongée –, franchissant collines et lotissements. En moins d’une minute, il progresse de
À midi, l’incendie a déjà atteint les secteurs de l’Estaque, Saint-Henri et Saint-André, dans le 16ᵉ arrondissement. Des pans de forêt et garrigue s’embrasent, le vent alimentant continuellement le brasier. À 13 h, une pluie de cendres tombe sur le centre-ville, transformant le ciel en un jaune étrange, spectacle rappelant l’ampleur du sinistre. C’est dans ce décor crépusculaire que 800 pompiers et marins-pompiers – soutenus par deux avions bombardiers d’eau et quatre Canadair – mènent un combat acharné. Selon le vice-amiral Lionel Mathieu, « 400 tonnes d’eau » ont été acheminées dans le ciel marseillais. Le SDIS 13 a mobilisé 400 sapeurs en renfort de 500 déjà en service, complétés en cours de journée par des colonnes venues du Gard et du Vaucluse.
Une progression foudroyante vers les quartiers habités, des dégâts considérables
Le bilan matériel est lourd : 700 hectares partiellement détruits, dont 250 sur Pennes-Mirabeau, 63 maisons touchées et une dizaine en cendres. En début de soirée, plus de 450 personnes ont été évacuées – employés d’un centre d’appels, résidents des quartiers périphériques, 71 pensionnaires d’un Ehpad aux Pennes-Mirabeau. Une cinquantaine d’entre elles ont passé la nuit dans l’un des quatre centres d’accueil ouverts par la municipalité. Côté transport, l’aéroport de Marseille‑Provence ferme temporairement, dix vols sont déroutés, et la SNCF interrompt les liaisons TGV entre Marseille et Avignon ; l’A55 est également fermée, provoquant des bouchons monstres en soirée.
Au gymnase de l’Estaque, Bastien accompagne son père, sous oxygène, encore secoué : « Pendant deux heures, on était seuls au milieu des flammes », explique-t-il. L’eau coupée, il a vidé la piscine familiale à la main, luttant contre les flammes, de crainte que bonbonnes de gaz ou voitures n’explosent. À quelques rues, Théo Giacometti, reclus chez lui avec sa compagne et leurs filles, décrit l’angoisse de voir les flammes, les entendre crépiter, sentir la fumée envahir l’habitation. Des oiseaux tombent morts dans le jardin. « Mais la solidarité était là : quand un bosquet a pris feu, les voisins l’ont éteint en équipe. »
Tension, peur et solidarité
Même constat dans le quartier de La Castellane, où des jeunes se sont portés volontaires pour aider les marins‑pompiers, déployant seaux et lances pour garder les ruelles sécurisées. Une réactivité applaudie par le préfet, Georges‑François Leclerc : « Quarante-cinq mille personnes ont très bien réagi et se sont confinées », assurait-il, tout en appelant à la vigilance, alors même que le feu avait repris en soirée à Pennes-Mirabeau, tandis que les lisières restaient instables sur Marseille.
Le préfet Leclerc souligne qu’il n’y a pas eu de mort, un exploit vu l’intensité du brasier. Mais deux jours plus tôt, un premier feu avait déjà touché la commune du Rove, nécessitant l’évacuation de plusieurs dizaines de personnes, en amont d’un week-end classé « risque très élevé ». Le maire de Marseille, Benoît Payan, a mobilisé les habitants : « Restez confinés, limitez les déplacements. Priorité aux secours. » Joint par Emmanuel Macron mardi, il confiait craindre que ce nombre de sinistrés ne soit plus élevé que prévu : « Deux cents pertes ? Cinquante ? Ce bilan sera connu demain. »
Un sinistre sans précédent depuis 2016
Marseille connaît malheureusement les feux de mistral depuis des décennies. En août 2016, un incendie géant animé par le vent avait ravagé plus de 2 500 hectares, principalement hors des zones urbaines. Le sinistre actuel, avec 700 hectares brûlés, est le plus spectaculaire et dangereux à menacer directement les quartiers habités de Marseille depuis au moins un siècle. Dans la mémoire collective, les incendies massifs du XXᵉ siècle – comme celui de 1921 qui ravagea plusieurs collines du secteur nord, ou celui de 1954 dans la chaîne de l’Estaque – avaient déjà soulevé l’indignation, mais aucun n’avait atteint cette rapidité de propagation et cette menace directe sur des secteurs peuplés.
Mercredi 9 juillet à l’aube, le feu a diminué sur Marseille mais reste actif sur les franges, particulièrement près des contours brûlés. Aux Pennes-Mirabeau, des reprises sont signalées dans les zones de garrigue. Les autorités maintiennent leur mobilisation : près de 800 pompiers toujours en opération, deux Canadair prêts à intervenir, aubettes en alerte. Des sites de soutien psychologique et d’aide matérielle ont été installés par la mairie et les associations de solidarité, mobilisant bénévoles, maraudeurs et distribuant denrées, eau, couvertures.