Reconnaissance de l’État de Palestine : le petit pas tardif de la France face à l’ampleur du génocide à Gaza et de la colonisation en Cisjordanie
Par N.TPublié le
Sous la coprésidence de la France et de l'Arabie saoudite, une conférence internationale sur la reconnaissance de l'État palestinien s'est ouverte lundi 28 juillet au siège des Nations Unies. Objectif annoncé : « redonner du poids » à la solution à deux États, cette option historique jugée par Paris comme « la seule susceptible de garantir la paix ». Plus de 100 pays sont représentés pour ce premier acte d'un processus devant culminer en septembre par une annonce solennelle de la France. L’absence, sans surprise, d'Israël et des États-Unis, farouches opposants, ainsi que le contexte d'horreur à Gaza, jettent une ombre criante sur les ambitions affichées.
L'initiative française, symbolisée par l'annonce récente d'Emmanuel Macron sur une reconnaissance future, est certes à saluer. Elle rompt enfin avec des décennies de paralysie diplomatique et place la France, premier pays du G7 dans cette position, en pointe. « Cette conférence va acter quelque chose qui se fait déjà dans les coulisses, en espérant donner du poids diplomatique à une feuille de route portée par la France », explique Thomas Vescovi, chercheur sur les territoires palestiniens. L'idée d'un « mouvement de reconnaissance réciproque » et l'espoir de rallier de nouveaux pays, européens ou non-alignés comme l'Inde, sont sur la table. Jean-Noël Barrot, ministre français des Affaires étrangères, promet même des condamnations inédites du Hamas par les pays arabes.
Une urgence humanitaire absolue
Mais comment ne pas souligner que ce sursaut intervient avec un retard accablant ? Il survient après des mois d'une offensive israélienne qualifiée par de nombreuses organisations et États de génocide, marquée par des dizaines de milliers de morts, une famine sciemment organisée à Gaza, et une accélération épouvantable de la colonisation en Cisjordanie occupée – où le Parlement israélien vient justement d'exhorter à l'annexion. « On voit cette annonce de la France comme si elle avait fait un cadeau aux Palestiniens, mais en réalité, elle effectue un rattrapage très tardif », tempère Thomas Vescovi. L'urgence humanitaire absolue et l'effondrement du droit international rendent ce « petit pas » diplomatique dérisoire face à l'ampleur de la catastrophe.
Le chemin vers une reconnaissance effective et significative demeure semé d'embûches colossales. La France se doit désormais d'accroître sa mobilisation diplomatique pour élargir le cercle des reconnaissances. La tâche est herculéenne. Elle implique de faire front à une double opposition : le gouvernement israélien, qui rejette catégoriquement toute perspective d'État palestinien et intensifie la colonisation, et son allié américain, qui a activement fait pression contre la conférence, la jugeant « contre-productive ». À l'intérieur même des frontières françaises, la droite et l'extrême droite constituent un autre front de résistance farouche à cette orientation.
Retrait de l’armée israéliennes, levée du blocus et sanctions
Surtout, cet objectif politique reste pure chimère sans un changement radical immédiat sur le terrain. Il ne peut être atteint sans un cessez-le-feu immédiat et total, sans la levée réelle et inconditionnelle du blocus humanitaire qui étouffe Gaza, et sans le retrait des forces israéliennes de l'enclave. Les récentes annonces israéliennes de trêves humanitaires ont été arrachées sous la pression croissante d'une opinion internationale horrifiée. Ces pauses minimales, résultat direct des images insoutenables diffusées dans le monde entier – files d'attente mortelles pour un sac de farine, enfants squelettiques, scènes de chaos quotidien –, ne suffisent pas. Elles soulignent au contraire l'impérieuse nécessité d'une cessation définitive des agressions meurtrières israéliennes comme préalable à toute reconstruction politique.
L'annonce française a redonné un semblant de consistance à un processus diplomatique moribond. Mais le véritable test ne sera pas le discours de septembre à l'Assemblée Générale. Il réside dans la capacité de la France et de ses partenaires à imposer, ici et maintenant, l'arrêt des massacres et l'accès massif à l'aide, préalables indispensables à toute discussion crédible sur un État palestinien viable, ainsi que des sanctions envers Netanyahou et sa clique de criminels de guerre.