Robert Badinter au Panthéon : l’hommage de la Nation française à un juste
La panthéonisation de Robert Badinter, le 9 octobre, est bien plus qu’une cérémonie solennelle. C’est la reconnaissance par la Nation française tout entière de l’œuvre d’une vie entièrement dédiée à la justice et à la dignité humaine. En faisant son entrée dans ce temple républicain, l’ancien garde des Sceaux y rejoint les Lumières.
Son nom restera à jamais gravé dans l’histoire pour avoir fait faire à la France un grand pas en avant sur le plan moral : l’abolition de la peine de mort en 1981. Cet acte fut un progrès décisif, une avancée à contre-courant de la barbarie. Robert Badinter était habité par la conviction inébranlable de l’inutilité et de l’extrême inhumanité de la mise à mort d’un condamné par l’État. Cet homme de droit a su, par la force de son argumentation et la passion de son engagement, convaincre les parlementaires et emporter une victoire historique. Il a eu l’honneur et le courage d’affronter une opinion publique alors majoritairement favorable au châtiment suprême, démontrant que le rôle d’un homme d’État est parfois d’éclairer le peuple plutôt que de le suivre.
Mais son héritage ne se limite pas à ce combat emblématique. Ministre de la Justice, Robert Badinter a mené d’autres batailles, moins médiatisées mais tout aussi fondamentales pour le progrès de la société. Il a ainsi œuvré pour la fin des discriminations pénales envers les personnes homosexuelles, faisant abroger des textes hérités de Vichy et de 1960 qui criminalisaient et stigmatisaient l’homosexualité. Son action a contribué à libérer les mœurs et à faire reculer l’injustice. Il fut également un artisan de la justice internationale, poursuivant inlassablement son idéal d’un monde plus juste.
Pourtant, alors que la France honore sa mémoire, son combat reste d’une brûlante actualité. Derrière la façade des grandes démocraties, la barbarie de la peine de mort perdure. Dans l’État américain de Caroline du Sud (sud-est), un homme âgé de 67 ans a été mis à mort par un peloton d’exécution, une mort violente et cruelle. D’autres États américains, comme l’Alabama, expérimentent des méthodes tout aussi inhumaines, telle que l’inhalation d’azote, assimilée à de la torture par les experts de l’ONU. Ces pratiques démontrent qu’au cœur même du monde occidental, la justice peut encore renoncer à son humanité.
L’entrée de Robert Badinter au Panthéon est donc un hommage à un « homme juste », mais c’est aussi un appel. Un appel à poursuivre son combat. En ces temps où la violence semble se banaliser, la vie et l’œuvre de Robert Badinter nous rappellent que la lutte pour les principes humanistes est un combat éternel, et que la civilisation se mesure au respect absolu de la vie humaine.