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Marseille, capitale mondiale des data centers : progrès numérique ou saturation urbaine ?

En l'espace d'une décennie, Marseille s'est hissée parmi les plus grands hubs numériques de la planète. Avec 18 câbles sous-marins reliant 53 pays et 4,5 milliards de personnes, la cité phocéenne est devenue incontournable dans l'architecture mondiale d'Internet. Mais cette ascension fulgurante a un prix : la multiplication des data centers transforme le paysage urbain et suscite l'inquiétude des élus comme des riverains.

Il y a dix ans, Marseille occupait la 44e place mondiale des centres de données. Aujourd'hui, elle se classe au 7e rang et vise le top 5 aux côtés de Francfort, Londres, Amsterdam et Paris. La France reste d'ailleurs le seul pays européen à disposer de deux hubs d'envergure mondiale. Cette transformation spectaculaire s'explique par une position géostratégique unique : au cœur de la Méditerranée, Marseille constitue le point de passage naturel des liaisons câblées entre l'Europe, l'Afrique, le Moyen-Orient et l'Asie.

Les chiffres donnent le vertige. 99 % du trafic mondial de données transite par des câbles sous-marins, et Marseille en concentre désormais une part considérable. Le dernier arrivé, Sea-Me-We-6, s'étend sur 21 700 km et relie directement la cité phocéenne à Singapour. Avant lui, le câble 2Africa, le plus long du monde avec ses 45 000 km, avait déjà choisi Marseille comme point d'atterrage européen.

Une croissance qui interroge

La ville compte actuellement sept grands data centers, dont le récent Phocea DC implanté dans le 3e arrondissement. Une douzaine de projets supplémentaires sont en cours, notamment à Bouc-Bel-Air où le leader mondial Digital Realty prévoit d'installer 24 000 serveurs d'ici 2027. L'un des sites les plus emblématiques occupe même une ancienne base sous-marine construite par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale, réhabilitant un lieu inutilisé depuis 75 ans.

Mais cette expansion soulève des préoccupations majeures. La consommation énergétique des data centers dépasse désormais des seuils qui alarment les autorités. Le futur centre de Bouc-Bel-Air consommera à lui seul l'équivalent d'une ville de 117 000 habitants. Des opposants réclament un moratoire.

Pour un élu de la mairie de Marseille, la ville est arrivée à saturation : « Ce sont des secteurs qui consomment du foncier à vocation économique sans créer d'emplois significatifs. » Face à ce constat, la préfecture des Bouches-du-Rhône a lancé une réflexion stratégique. Une politique d'aménagement territorial dédiée aux data centers devrait voir le jour en 2025, avec des critères stricts en matière de consommation d'espace, d'énergie et d'impact environnemental.

La majorité municipale, composée de gauches et d'écologistes, plaide pour une meilleure intégration urbaine de ces infrastructures et de nouvelles solidarités énergétiques locales. Le défi est de taille : comment rester un champion mondial du numérique tout en préservant la qualité de vie des habitants et l'environnement exceptionnel des Calanques toutes proches ?

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