Marwan Barghouti menotté, en tenue de bagnard, et bras levés en signe de victoire... (DR)

Grève de la faim. La grande détermination des détenus palestiniens

Plus d’un millier de prisonniers palestiniens poursuivent leur grève de la faim, entamée le 17 avril. Ils dénoncent une détention inhumaine. Dans les territoires occupés, dans des villes européennes et dans plusieurs pays du monde, la solidarité prend de l’ampleur.

C’est un combat de derrière les murs, dans l’obscurité des geôles israéliennes… Plus de 1 600 prisonniers palestiniens se font violence dans une grève de la faim entamée depuis le 17 avril, déterminés à faire entendre leurs cris de révolte devant leur traitement par les autorités pénitentiaires qui vont, selon des sources concordantes -rapports d’ONG et autres témoignages- jusqu’à des actes de torture.

Leurs revendications se résument,à la simple application des conventions des droits de l’homme et des prisonniers politiques. Et à la dénonciation du système judiciaire dans les territoires occupés, véritable machine broyeuse de libertés. Quelque 6 500 Palestiniens, dont des dizaines de femmes et d’enfants, sont incarcérés dans ces conditions cauchemardesques. La case prison est quasiment devenue un passage obligé dans la vie de la grande majorité des adultes.

Le mouvement des détenus trouve un large écho dans les territoires. Mercredi 3 mai, ils étaient des milliers à Ramallah, en Cisjordanie occupée, brandissant, entre autres, le portrait de Marwan Barghouti (1) menotté, en tenue de bagnard, et bras levés en signe de victoire. Le «Mandela palestinien» végète en prison depuis 2002, condamné à cinq peines à perpétuité. Le Parlement européen et de nombreux dirigeants dans le monde se sont prononcés en faveur de sa libération, convaincus qu’il est en mesure de faire aboutir les accords de paix.

«Israël ne peut pas nous faire taire, nous isoler, ni nous briser. (…) Cette grève de la faim vise à contrer les politiques d’occupation israéliennes injustes qui se poursuivent et s’accélèrent contre les prisonniers et leurs proches. (…) Nous sommes déterminés à mener ce combat, quel qu’en soit le prix», dénonce-t-il dans une lettre publiée par les soutiens des détenus. Selon ceux-ci, une cinquantaine de prisonniers ont rejoint le mouvement, jeudi 4 mai, dont Ahmad Saadat, chef du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP, gauche).

La solidarité s’exprime dans de nombreuses villes européennes. Dans des lieux publics, des volontaires cessent de s’alimenter durant 2, 3, jusqu’à 12 jours, à Manchester, Édimbourg, Londres, Turin, Bruxelles, Bologne et Paris – à la fontaine des Innocents, dans le quartier des Halles. De son côté, l’Autorité palestinienne tente de se faire entendre des institutions internationales (lire ci-dessous) afin de faire pression sur Israël. Peine perdue ! Les autorités de l’État hébreu font jusque-là la sourde oreille. La répression est montée d’un cran. Plusieurs leaders, dont Marwan Barghouti, ont été mis à l’isolement et d’autres sont répartis dans d’autres prisons. Les autorités tentent aussi l’alimentation forcée. L’ordre des médecins israéliens s’y opposant, elles requièrent des médecins étrangers, grassement rémunérés. Un nombre croissant de prisonniers épuisés souffrent de problèmes de santé. Leurs soutiens signalent plusieurs cas d’atrophie musculaire et de perte d’équilibre. Faute de soins, leur état se dégrade. Pas leur détermination.

Le mouvement rassemble cette fois différentes tendances partisanes. L’épreuve est vécue dans l’unité. «Il n’y a personne qui dit “ce gars est du Hamas”, “celui-ci est du Fatah”, “celui-là est d’al-Jabhah” (Front populaire pour la libération de la Palestine)», explique Aarab Marwan Barghouti, fils du leader, dans un entretien publié par «Chronique de Palestine» (chroniquepalestine.com), à la suite d’un rassemblement de solidarité aux États-Unis, à Chicago.

1) Marwan Barghouti a été particulièrement actif et s’est fait connaître durant la première et la seconde Intifada. Il était le chef de file du Tanzim, un groupe paramilitaire de l’organisation Fatah.

Source: Humanité Dimanche N° 561