Fuir ou mourir : l'ultimatum israélien pour vider Gaza
Les chars israéliens bloquent désormais la route principale menant à la ville de Gaza. Jeudi, ils ont dressé des barricades de sable pour empêcher les habitants déplacés de revenir chez eux, tandis que le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, lançait une sinistre « dernière occasion » aux civils encore présents : fuir ou mourir.
Ce langage et cette pratique ne laissent aucun doute : Israël se livre ouvertement à un crime de déportation forcée, interdit par le droit international. L’armée israélienne n’évacue pas les populations pour les protéger d’un front militaire mouvant. Elle organise méthodiquement la disparition des habitants de Gaza de leur propre ville, déjà en ruine après des mois de bombardements massifs.
Une ville qu’on veut vider de ses survivants
La logique de l’opération est glaçante : pousser les Gazaouis vers le sud et les empêcher de revenir, même lorsqu’ils avaient quitté la ville seulement pour chercher de la nourriture ou un abri temporaire. Ceux qui restent sont implicitement assimilés aux combattants du Hamas et condamnés à être pris pour cibles. Israël Katz l’a dit sans détour : « laisser les agents du Hamas isolés dans la ville de Gaza elle-même ». Or chacun sait que la ville n’abrite pas uniquement des combattants, mais encore plusieurs centaines de milliers de civils. La menace équivaut donc à une condamnation à mort pour tous ceux qui refusent l’exil.
Selon l’ONU, 600.000 à 700.000 personnes se trouvent encore dans la ville de Gaza. Beaucoup affirment vouloir rester malgré les bombardements, de peur de ne jamais revoir leur foyer. « Nous ne partons pas. Hier, un drone a largué des grenades sur le toit de notre immeuble, mais nous ne partons pas », témoigne Hani, 24 ans, cité par Reuters. Pour lui comme pour tant d’autres, partir signifie l’arrachement définitif.
Déportation, génocide, extermination
Israël n’a en réalité nul besoin d’une telle opération. Son armée contrôle l’ensemble de l’enclave, avance dans les ruines sous la protection des frappes incessantes. Cette « dernière chance » donnée aux habitants n’a rien d’une nécessité militaire. Elle relève d’une logique exterminatrice : réduire la population de Gaza au minimum, exterminer un maximum de survivants, effacer toute présence palestinienne organisée dans ce qui fut une ville.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 66.000 morts depuis octobre 2023 selon les autorités sanitaires locales, des hôpitaux contraints de fermer, des familles décimées par des frappes sur des cuisines collectives ou des écoles. La soi-disant « zone humanitaire » d’al Mawasi a elle-même été touchée, tuant neuf personnes dont cinq d’une même famille. Tout cela confirme que l’objectif n’est pas de combattre une organisation armée, mais de détruire une population.
Une manœuvre politique derrière le massacre
Cette intensification intervient au moment même où Benjamin Netanyahou fait mine d’accepter un plan de paix concocté par Donald Trump. Un plan qui, sous couvert de solution, ne promet aucun État palestinien à court terme et laisse Israël maître absolu du calendrier et du territoire. La seule perspective immédiate qu’il offre est l’arrêt des combats, donc la fin – au moins temporaire – des massacres.
C’est sans doute cette hypothèse qui pousse Israël à accélérer la tuerie. Car si le Hamas devait accepter ce plan, un cessez-le-feu pourrait s’imposer, stoppant le processus de destruction en cours. D’où cette offensive visant à vider Gaza avant que la paix ne vienne mettre un terme, même fragile, à la guerre.
Une stratégie coloniale assumée
L’armée israélienne ne cache plus sa volonté de remodeler Gaza selon ses intérêts : en détruisant la ville, en interdisant le retour de ses habitants, en laissant planer la menace d’une élimination pure et simple de ceux qui résistent. C’est la vieille logique coloniale poussée à son extrême, dans une enclave devenue laboratoire d’un crime contre l’humanité en direct.
Face à cela, les déclarations internationales restent largement inaudibles, incapables de stopper une politique qui prend pour cible les civils, les malades, les enfants. Les hôpitaux ferment, les couloirs humanitaires sont bombardés, les familles entières rayées de la carte. Et la communauté internationale continue de parler de « droit à la défense » d’Israël, comme si la déportation et le massacre pouvaient relever de la légitime défense.
La mémoire d’une ville assassinée
Gaza, ville déjà martyrisée, est aujourd’hui vidée de son souffle. Ses habitants sont contraints à l’exil, avec la certitude qu’ils ne reverront jamais leurs maisons ni leurs quartiers. Derrière les chiffres, ce sont des mémoires, des lieux de vie, des histoires familiales qu’on efface.
Il ne s’agit plus seulement de guerre, mais d’une entreprise planifiée de disparition. En bloquant la route principale, en érigeant des barricades de sable, l’armée israélienne a signé l’acte d’une déportation de masse. Dans l’histoire contemporaine, ces images resteront comme celles d’un génocide accompli à à ciel ouvert, sous les yeux d’un monde qui détourne le regard.